Détruire une image n’en efface pas pour autant son existence. Les souvenirs eux-mêmes ne peuvent se détruire : ils se transforment en échos, en images intimes superposées au présent.

Jeewi Lee, virtuose de la mémoire, fait de l’absence une existence permanente. La série Memoria voit le jour en 2016 dans les mains de la plasticienne et reflète la volonté de réinventer le passé. Elle crée une dissonance des temps, en mariant l’éphémère à l’éternité, dépassant l’existence humaine et la peur de disparaître.

Ce sont des photographies caractérisant l’enfance et la découverte, finement découpées qui se retrouvent soigneusement placées entre deux feuilles de papier Hanji, matériau coréen qui prend vie grâce à l'écorce de mûrier, réalisé par l’artiste elle-même.

D’une résistance presque héroïque, son processus de création, avec ses multiples cuissons accompagnées de gestes précis, exécutés comme une danse, lui confère une longévité millénaire. Un savoir-faire transmis de génération en génération, véritable héritage immatériel qui chuchote à double voix avec des clichés d'antan.

C'est alors qu'une certaine fragilité se retrouve piégée dans une composition des plus résistantes, comme un souffle nostalgique doucement attrapé. Les morceaux d'image deviennent des pétales de fleurs dispersés dans un espace cotonneux, la transparence laisse percer des couleurs douces qui semblent vouloir doucement s’enfuir sans jamais pouvoir se mouvoir.